Lâchée à l’entrée du cimetière par le bus de la ligne 9, Bittori remonte la travée centrale, haletant sous un épais manteau noir, bien trop chaud pour la saison. Afficher des couleurs serait manquer de respect envers les morts. Parvenue devant la pierre tombale, la voilà prête à annoncer au Txato, son mari défunt, les deux grandes nouvelles du jour : les nationalistes de l’ETA ont décidé de ne plus tuer, et elle de rentrer au village, près de San Sebastián, où a vécu sa famille et où son époux a été assassiné pour avoir tardé à acquitter l’impôt révolutionnaire. Ce même village où habite toujours Miren, l’âme soeur d’autrefois, de l’époque où le fils aîné de celle-ci, activiste incarcéré, n’avait pas encore de sang sur les mains – y compris, peut-être, le sang du Txato. Or le retour de la vieille femme va ébranler l’équilibre de la bourgade, mise en coupe réglée par l’organisation terroriste. Des années de plomb du post-franquisme jusqu’à la fin de la lutte armée, Patria s’attache au quotidien de deux familles séparées par le conflit fratricide, pour examiner une criminalité à hauteur d’homme, tendre un implacable miroir à ceux qui la pratiquent et à ceux qui la subissent. L’ETA vient de déposer les armes mais pour tous une nouvelle guerre commence : celle du pardon et de l’oubli.
Un livre extraordinaire… L’entrée dans le quotidien de deux familles unies par l’amitié et désunies par un conflit fratricide. Une description sans complaisance de la lutte armée de l’ETA et de la répression de l’Etat espagnol, de la situation inextricable dans laquelle se retrouvent les habitants. La vie d’un homme est peu de chose face aux discours nationalistes fanatiques et réducteurs. Finalement, la force du pardon est peut-être la seule chose qui permettra de survivre. Implacable! Je comprends que ce roman ait reçu le prix national de littérature en Espagne et qu’il ait « enflammé la société espagnole ». Bonne lecture!
« Les femmes, elles savent vraiment bien nous embobiner! Allongé sur le lit, la tête vide, Joxe Mari regardait le carré de ciel bleu de la fenêtre. Il resta longtemps immobile, apathique, les mains jointes sous la nuque. Peu à peu lui virent des pensées. Plutôt des images. Le temps, subitement, se rembobinait en accéléré. Le temps, un film qui racontait sa vie à rebours. Il sortait prestement d’une prison pour entrer dans une autre et dans une autre; il fut maltraité, enfermé, il remonta jusqu’à la lutte armée, à l’après-midi pluvieux où le Txato l’avait regardé dans les yeux, au pub où il avait tiré pour la première fois sur un homme, à la France, au village, et quand il arriva à l’âge de dix-neuf ans, les fugaces images mentales s’interrompirent brutalement. Il imagina alors un destin différent, et son heure de gloire avec la réalisation du grand rêve de sa vie, signer dans l’équipe de handball du FC Barcelone. »
Patria !
les personnages qui s’appréciaient et qui aujourd’hui se détestent .des familles déchirées, de la tristesse, des remords, du pardon . un mélange intense de sentiments opposés
Gros succès de littérature espagnole, j’ai apprécié la trame évolutive
je n’ai pas découvert un chef d’oeuvre mais c’est une bonne lecture
Magnifique lecture!
J’ai dévoré ce livre, et ne suis pas prête de l’oublier.
Portrait d’une société en prise avec le terrorisme, à travers le quotidien de deux familles, deux faces de l’histoire.
Tant à dire sur ces années noires.
Intéressant aussi ce matriarcat basque, bien présent dans le livre.
Sympa pour moi qui connais San Sebastian, d’avoir pu visualiser tous ces lieux.
Je recommande!
Le récit d’une période trouble où la lutte armée menée par l’ETA a généré tant de conflits fratricides. La jeunesse, animée d’idéaux tronqués par une certaine propagande, ne parvient plus à faire la part des choses et fonce tête baissée dans cette lutte qu’ils croyaient salvatrice.
Lutte tellement semblable à tant d’autres où l’ami devient soudainement l’ennemi à abattre.
Une maturité plus tard, on se pose des questions et notamment POURQUOI ?
Le livre de Fernando Aramburu nous immerge dans le pays basque espagnol, en décrivant bien cette atmosphère de plomb de l’époque.
La structure de l’écriture, mélangeant le présent et le passé, m’a cependant perturbée durant quelques chapitres.